mercredi 21 novembre 2012

La science sert aussi à évaluer la technique

Le fétichisme de la technique croyance en son aptitude à toujours fournir une solution à un problème matériel quelconque non seulement nous asservit, mais il est gros de conséquences. Toute technique, même la plus apparemment bienfaisante, a son revers nuisible. Ainsi, les engrais azotés proviennent de la fixation de l'azote atmosphérique par le procédé Haber-Bosch. S'il venait à s'interrompre, au moins deux milliards d'humains souffriraient de famine au bout de quelques mois. Il n'est donc pas question d'y renoncer. 
Pourtant, il a son revers, connu de tous, qu'il s'agisse de l'envahissement des côtes bretonnes par des algues une eutrophisation créée par les rejets des élevages de porcs ou de la zone morte de l'Atlantique découlant de l'agriculture tout au long du Mississippi. Nos actions quotidiennes les plus banales ont un côté nocif. Les sachets en plastique qui contiennent nos achats se retrouvent dans d'immenses poubelles encombrant les océans, là où les courants font des ronds-points, et détruisant des espèces vivantes. Mon propos est de mettre l'accent sur des actions dont on croit à tort qu'elles vont dans le bon sens, être un progrès, une énergie douce contribuant à un "développement durable", en novlangue (la "Newspeak" d'Orwell). Ne nous voilons pas la face, une innovation technique conduit le plus souvent à un transfert de nuisances, à un simple changement d'étiquette. J'en donnerai pour exemple les puissants aimants au néodyme inventés dans les années 1980 et utilisés pour la production d'électricité, tant par les voitures hybrides que par les éoliennes, des dispositifs tenus pour écologiques. Le néodyme est une terre rare. Un véhicule hybride, une Toyota Prius, pour fixer les idées, en consomme 1 kg. Il en faut des centaines de kilos pour chaque éolienne. La consommation globale actuelle excède 10 kilotonnes par an. On peut craindre désormais une raréfaction accrue de cette ressource minérale. Ces deux applications visent à lutter contre le réchauffement global (nuisance A), elles appauvrissent le patrimoine minier collectif, même avec un taux de recyclage de 90 % (nuisance B). Ce n'est pas tout. L'indispensable purification du néodyme exige de le séparer d'avec d'autres éléments lourds. D'où de dangereux rejets radioactifs que nul ne surveille, qui polluent l'environnement (nuisance C). Les lieux d'extraction étant africains ou chinois, les nantis des pays du Nord ne s'en préoccupent aucunement. Cessons de faire l'autruche. Il est grand temps de regarder les choses en face et d'évaluer toute technique d'un regard froid, celui du scientifique, et de lutter contre le lavage de cerveaux procédant par angélisme et simplification à outrance, qu'il nous vienne des politiques ou des médias.

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